Syndiqués, pas voyous…

A l’appel de l’UD CGT, près de 500 manifestants ont investi l’aéroport Marseille-Provence jeudi. Confrontées aux mêmes maux, les entreprises en lutte ripostent en bloc.

L’appel est national et sa forte déclinaison marseillaise a du sens : « Air France, c’est 2,07% du PIB Paca, 47 000 emplois directs et indirects et c’est sur ces chiffres que la direction nous condamne pour faire une économie de 13,9 millions d’euros », rappelle Serge Bodredo, le secrétaire CGT Air France à Marseille. Depuis 2003 qu’Air France vole sur un air de privatisation, c’est désormais la cloche de la rentabilité qui sonne et l’escale marseillaise est sur la liste des hécatombes annoncées.

« On veut nous exterminer, c’est tout ». Jacques Luciani, agent de piste, 30 ans de boîte, a le verbe fort. A la hauteur de la souffrance endurée : « on nous vire pour faire venir de la main d’oeuvre pas chère…du low-cost, via de la sous-traitance où aucun syndicat ne rentre pour faire valoir les droits sociaux ». Personnel au sol Ingrid Molina confirme que son collègue n’a pas de lubies, les dégradations des conditions de travail sont allées de paire avec la privatisation : « On avait une épée de Damoclès sur la tête, elle vient de tomber. C’est déjà à l’oeuvre chez Aviapartner où pour le même travail, les conditions sont moindres. Nous avons aussi perdu des jours de congés, psychologiquement c’est usant. D’autant plus quand on sait que le président vient de doubler son salaire. »

Pour autant, des solutions, les responsables syndicaux et les élus des CE en ont. Mais « toutes les propositions économiques que nous faisons sont rejetées. Mais nous c’est garantie de l’emploi et pouvoir d’achat et quand on signe, contrairement à Hollande on prend nos responsabilités ». ne décolère pas Serge Bodredo. Le dialogue social est piétiné. « Quand la direction nous invite à des réunions dites de concertation pour nous demander de choisir les gens à supprimer ! » ne décolère pas Serge Bodredo. Et chez Air France, on s’y entend pour brouiller les pistes : « on tire sur la corde, on provoque et on criminalise le syndicalisme ».

Les patrons saccagent et piétinent

Une recette déjà si bien usée que les soutiens dans cette manifestation ne manquent pas : Telecom, Filpac, Pétrochimie, grande distribution et commerces, réparation navale, Nexcis, SFR, portuaires, dockers, marins, Moulins Maurels, Saint-Louis Sucre…tous convergent, menés dans le même bateau ultra libéral. Secrétaire général du syndicat CGT des marins de Marseille Frédéric Alpozzo connaît les ficelles : « on détruit l’emploi sur la même logique ». Ici ce sont 5 salariés menacés de licenciement pour des actes de violence, mais pourquoi ne pas avoir condamné de la même façon les socio-professionnels en juillet 2014 lorsqu’ils ont saccagé le Jean Nicoli à coup de cocktails molotov ? » Aucune condamnation, ni enquête, ni même dénonciation. « On est dans la posture, dans la démonstration que ce gouvernement n’est pas républicain ».

Tous sacrifiés sur l’autel de la rentabilité ? « Oui. Clairement » répond-on chez Total La Mède dont les salariés se battent toujours pour inverser la vapeur d’une direction qui ferme la raffinerie et supprime 185 postes. Le secrétaire du CHSCT a été mis à pied 3 jours pour avoir réagi à une provocation du président du CHSCT et directeur adjoint alors qu’était évoqué un accident mortel dans lequel l’employeur a été condamné pour faute inexcusable : « il nous répond que la mort sur un site industriel fait partie de la vie, j’ai pas supporté et jeté une bouteille contre un mur ».

Pas mieux traités à l’AP-HM. Son bras tuméfié, Pascal Jourdan, responsable CGT à l’hôpital Nord, le doit à la pression du « directeur général de l’ARS Paca qui m’a molesté alors que nous venons réclamer des moyens pour travailler, rendre ce service au public ». Car c’est de ça qu’il est question : « Chez Orange on sait ce que c’est la casse du service public, témoigne Olivier Méri, secrétaire départemental CGT Télécom, déjà 50 000 emplois de moins depuis 1995 et 30 000 suivront d’ici 2020 alors que cette année le groupe fait 12 milliards de profit ».

Mais la mobilisation même rendue difficile gagne du terrain et porte ses fruits. « En 10 ans, la logique de coupe budgétaire a fait disparaître 30 000 emplois dans les finances publiques, décompte Frédéric Larrivée, co-secrétaire CGT, mais ce matin, suite à la mobilisation et à l’intervention d’élus locaux, on a gagné le maintien de la trésorerie de Miramas ». Et si les politiques mouillaient leur chemise ?

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